Modification apportée en 1880, pour les récents progrès de la verrerie à bouteilles.

Extrait de la revue générales des sciences n°3 de Mr Emilio Damour ( ingénieur des verreries de Folembray)

 

La transformation, progrès évident et très sensible en verrerie, a eu les conséquences les plus graves au point de vue de la main d’œuvre verrière, et a constitué une source de perturbation, peut-être la cause principale de l’état actuel et des grèves de ces dernières années. Le double progrès des fours et des moules, modifiant complètement les conditions du travail, aurait dû être suivi d’une révision sage et loyale des tarifs des verriers ; c’est cependant ce qui n’a été fait presque nulle part. Les tarifs actuels sont généralement mauvais, mal compris, mal étudiés, parfois appliqués sans droiture : ils sont une cause de mécontentement permanent, sur laquelle les événements récents nous conduisent à insister.

Dans le travail actuel, tous les ouvriers ont l’avantage de travailler avec des cannes plus courtes et plus légères que celles qui étaient nécessaires pour atteindre le fond des pots ; c’est une grande réduction de fatigue.

Le gamin a l’avantage de travailler à niveau constant, à pot plein, mais, en raison de cette facilité, on lui demande de faire un cueillage de plus, celui que faisait jadis le grand garçon ; il doit cueillir à l’avance, selon l’expression consacrée, et a un travail précipité, plus fatigant pour les vieux ouvriers que le travail en pots : tout en faveur des enfants, lesquels font très vite leur apprentissage, cette modification n’a pu manquer de décourager les anciens gamins, lesquels se sont vus imposer un travail plus pénible, où leurs anciennes aptitudes étaient sans usage.

Le grand garçon est le plus avantagé par la méthode actuelle, puisque le gamin fait une partie de sa besogne ; mais, empiétant lui-même sur le travail du souffleur et faisant à demi la bouteille, il se sent presque l’égal de son maitre-verrier, et se plaint de ne gagner que les 2/3 de son salaire : c’est aussi un mécontent, et le plus intraitable ; car les tarifs actuels rendent le recrutement difficile.

Le souffleur a un travail bien simplifié à tous égard : il n’a plus le façonnage des épaules et celui du fond, si difficiles l’un et l’autre, ni en général la pose du filet de verre autour du goulot, remplacé souvent par la bague refoulée. Mais le soufflage en moule fermé est plus dur pour ses poumons. D’autre part, avec les difficultés de son art, il a vu disparaître les prérogatives qu’elles lui conféraient, et surtout cette autorité indiscutée sur les ouvriers de la place, autorité si nécessaire au bon travail ; il est souvent mal secondé par des aides trop jeunes et novices, et ne trouve plus dans son métier l’intérêt passionné des ouvriers d’antan. Bien qu’assez payé, trop peut-être par rapport au grand-garçon, il n’est pas moins mécontent que les autres.

Tels sont les effets des progrès récents sur l’état d’esprit de la corporation verrière. Est-il besoin d’ajouter qu’il serait urgent d’y porter remède ?

 

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